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A propos du feuilleton du droit de retrait dans les sociétés d’exercice libéral : suite et fin ?


Rédigé par Philippe Touzet le Lundi 21 Mars 2022

Nous republions dans Parabellum le commentaire de Philippe Touzet, initialement publié au Dalloz Actualité en mars 2022, de l'arrêt de la Cour d'appel de renvoi de Caen du 15 février 2022, qui achève la saga jurisprudentielle initiée par le surprenant arrêt de la première chambre civile de la Cour de cassation du 12 décembre 2018 ayant prohibé le retrait capitalistique dans les SELARL.



Si la plupart du temps, les décisions judiciaires ne font qu’appliquer des solutions connues et sont finalement attendues, il arrive parfois que ce ronronnement rassurant soit interrompu par une décision disruptive, marquant une véritable rupture dans la matière considérée. Ladite rupture peut apparaitre comme heureuse, structurante, ou au contraire destructrice, faire voler en éclat d’anciennes certitudes, et entrainer la stupéfaction des commentateurs. 


C’est une rupture de ce dernier type que provoquait l’arrêt de la première chambre civile de la Cour de cassation du 12 décembre 2018, en prohibant le retrait capitalistique dans les SELARL.
 
La cour d’appel de Caen, désignée comme juridiction de renvoi, vient de statuer sur cette espèce (Caen, 1ère ch. civile, 15 février 2022, n°20/02697). Qu’en est-il, désormais, du droit positif applicable au renvoi capitalistique dans une société d’exercice libéral (SEL) ?
 
Les faits étaient parfaitement banals. Une avocate, associée d’une SELARL, en mésentente avec ses associés, notifiait son retrait puis saisissait le bâtonnier d’une demande d’arbitrage afin qu’il soit statué sur la valorisation et la cession de ses parts sociales. A noter toutefois que les statuts de la SELARL ne contenaient pas de clause de retrait. Le bâtonnier désignait néanmoins un expert en vue de procéder à ladite valorisation. Saisie d’un recours, la Cour d’appel de Rouen confirmait cette décision. La SELARL formait alors un pourvoi, qui amenait la haute Cour à casser la décision déférée, avec la désormais célèbre motivation suivante : «  A défaut de dispositions spéciales de la loi l’autorisant, un associé d’une société d’exercice libéral à responsabilité limitée d’avocats ne peut se retirer unilatéralement de la société, ni obtenir qu’une décision de justice autorise son retrait, peu important le contenu des statuts ».
 
On découvrait donc, 28 ans après la promulgation de la loi n° 90-1258 du 31 décembre 1990, que les statuts des SEL ne pouvaient pas prévoir un droit de retrait capitalistique !
 
Retrait et liberté d’établissement
 
Cette décision venait contrarier une pratique généralisée, quasiment universelle, car dans leur immense majorité, les sociétés d’exercice constituées par les avocats contiennent une clause de retrait capitalistique. En effet, avant l’avènement des SEL, il n’existait, à la disposition de la plupart des libéraux (hormis les experts-comptables qui ont eu accès dès 1945 aux sociétés de droit commun) qu’un seul type de société, la société civile professionnelle (SCP), régie par la loi n°66-879 du 29 novembre 1966, laquelle comprend un article 18, qui institue un droit de retrait capitalistique, jugé d’ordre public : « un associé peut se retirer de la société, soit qu’il cède ses parts sociales, soit que la société lui rembourse la valeur de ses parts. »
 
Les praticiens, qui ont commencé à constituer des SEL à partir du début des années 1990, ont naturellement repris la clause de retrait, et peu d’auteurs se sont posés la question du fondement légal de cette institution (cf. toutefois notre article du 10 novembre 2015 "Droit de retrait de l'associé, quel fondement ?" ).
 
Ainsi, pour les libéraux et notamment pour les avocats, le droit de retrait fait partie intégrante de la culture professionnelle. Ce droit apparait comme inhérent à toute forme d’association, et ce d’autant plus que les libéraux sont également très attachés au principe d’indépendance, valeur cardinale, et que la possibilité de se retirer d’une structure dans laquelle on ne souhaite plus exercer constitue pour beaucoup une nécessité impérative au seul titre de ce principe, décliné en « liberté d’exercice ». (Le retrait  ne fait cependant pas l’unanimité. Ses incidences financières ont amené par exemple un auteur à le qualifier de « bombe à retardement » (Serge Nonorgue, « L’absence de droit au retrait de l’associé de SEL », la Semaine juridique - Entreprise et affaires - n° 20 - 16 mai 2019)

A propos de la liberté d’exercice, on citera notamment une décision de la cour d’appel de Colmar du 1er juin 2016, refusant d’annuler la décision de l’ordre des avocats d’inscrire la nouvelle structure de l’avocat retrayant, avec la motivation suivante : « Sauf à porter atteinte de manière injustifiée à la liberté d’exercice et d’installation de X, le Conseil de l’Ordre ne pouvait, au motif que X était en litige avec ses ex associés quant aux modalités de son départ, refuser d’homologuer les statuts de la nouvelle association créée par X avec Y. ». La liberté d’établissement était également employée au soutien de l’arrêt initial rendu dans l’espèce commentée par la première cour d’appel (Rouen, 1ère ch. civile, 7 décembre 2016, n° 14/02256) qui avait estimé que « le retrait autorisé par la décision entreprise était justifié par la nécessité de permettre à Mme X, d’une part, de ne plus exercer dans les deux structures, dont elle était associée, en ce qui la concerne, aux seules fins d’exercer son activité libérale d’avocat […] d’autre part, de pouvoir précisément assurer cette activité libérale dans le cadre d’une autre structure, en vertu de la liberté d’établissement. »

C’est dire à quel point, en bloquant toute possibilité de retrait capitalistique, l’arrêt du 12 décembre 2018 était un coup de tonnerre dans l’univers des professionnels libéraux utilisateurs des SEL.
 
Nous avions naturellement commenté cette décision ("Fin du droit de retrait "), largement remise en cause par la doctrine tant sur le plan du raisonnement juridique que sur celui de l’opportunité :

«  Pour autant, qu'il nous soit permis de douter de cette interdiction absolue. En effet, c'est une chose de ne pas prévoir le droit de retrait. Il en est une autre que de l'interdire. […] pareille interdiction, issue de pareille interprétation, est peu plausible. Si l'on devait considérer que le droit de retrait n'est possible que s'il est textuellement permis, avec la question de savoir, pour les sociétés dans lesquelles il est précisément prévu, si les statuts doivent le stipuler ou pas pour qu'il existe, cela signifierait que les statuts ne pourraient jamais stipuler de droit de retrait, hormis dans les sociétés pour lesquelles des textes le permettent. Cette vision, déconnectée de la notion d'exercice, est aujourd'hui dépassée. On sait, depuis la loi dite « Macron » du 6 août 2015 et ses nombreux décrets d'application, les avocats peuvent aujourd'hui être associés dans plusieurs structures d'exercice(…), et même exercer dans plusieurs sociétés ayant pour objet la profession d'avocat. De telles perspectives sont peu concevables sans droit de retrait […] » (Bastien Brignon, Revue des sociétés 2019 p.322).
 
« Cette jurisprudence de la première chambre civile laisse pour le moins sceptique, mais ne doit pas pour autant être surinterprétée […] Ce qui surprend également est que la première chambre civile ait éprouvé le besoin d'ajouter que le contenu des statuts ne saurait modifier la solution retenue. Cela signifie-t-il que les statuts ne peuvent pas prévoir le droit de retrait de l'associé de SEL ? C'est ce que semble dire la Cour de cassation en visant notamment l'alinéa 2 de l'ancien article 1134 du code civil, aux termes duquel le contrat ne peut être révoqué que du consentement mutuel des contractants, ou pour les causes que la loi autorise. Cette référence au droit commun des contrats ne confère-t-elle pas une portée plus large à la solution ici retenue pour les SEL ? […] l'ancrage de cette solution dans le droit commun des contrats fournit des arguments pour la combattre. Le visa de l'ancien article 1134 du code civil laisse à penser que le droit de retrait est ici analysé par la première chambre civile comme un droit de révocation unilatérale d'un contrat qui existerait entre l'associé et la société ou entre les associés. En suivant cette analyse, discutable à l'infini, le retrait d'un associé est envisageable, selon ce même droit commun des contrats, lorsque les parties au contrat en question (associés, société) y ont consenti. Si les statuts reconnaissent à tout associé le droit de se retirer en obtenant de ses coassociés le remboursement de ses parts ou actions, il y a bien expression d'un consentement mutuel à la révocation unilatérale du contrat entre associés°». (Eddy Lamazerolles et Anne Rabreau, Recueil Dalloz 2020 p.118)
 
« Cette solution, tant dans son principe, que dans son visa, peine à emporter la conviction, spécialement dans le cadre de sociétés réunissant des professionnels libéraux entre lesquels la constitution d’une société repose sur un fort intuitu personae. C’est bien ce lien si particulier réunissant ces professionnels classiquement associés sous forme de société civile professionnelle (SCP) qui a conduit le législateur à permettre à l’un de ces associés de se retirer. Ce droit est encadré, par le droit commun des sociétés civiles. […] Dès lors, on s’étonnera que la Cour de cassation rejette de façon absolue toute faculté de retrait dans une SELARL d’avocats. […]  Il faudrait au moins permettre d’adapter les statuts de la société en stipulant un droit de retrait, et ce au nom de la liberté contractuelle, car on voit mal quel motif d’ordre public pourrait s’y opposer. Le législateur a d’ailleurs ponctuellement permis le retrait d’un associé de SEL [de notaire], et on ne voit pas pourquoi les associés d’une autre profession ne pourraient pas user de leur liberté contractuelle pour régir la sortie de la société.» (Laura Sautonie-Laguionie Revue des contrats n°2, 2019,  p.42)
 
Dans ce contexte, l’arrêt de renvoi était, pour le moins, attendu par tous les observateurs.

La Cour d’appel de Caen semble avoir évité les principaux écueils et a rendu une décision plus nuancée que celle de la Cour de cassation, et tenant compte de l’évolution de la jurisprudence, notamment celle de la première chambre civile de la Cour de cassation elle-même, sur la nature contractuelle de l’engagement des associés de sociétés à forme commerciale.

Tout d’abord, la Cour distingue le retrait capitalistique du retrait d’exercice, ce qui l’amène à considérer que le statut d’associé non-exerçant, et le maintien de la  participation en capital de l’associé partant « n’est absolument pas un obstacle à l’exercice de la profession d’avocat » et que « le maintien de ses participations ne l’empêche pas de s’établir librement sous le mode d’exercice qui lui convient. »

En second lieu, l’arrêt affirme le caractère contractuel du contrat de société, lequel, « à l’instar des autres conventions légalement formées tient lieu de loi à ceux qui l’ont fait et ne peut pas être révoqué de manière unilatérale à la seule diligence de Madame X. » Elle ajoute qu’aucune disposition légale ne permet un tel retrait unilatéral, mais aussi que « les statuts des sociétés concernées ne l’aménagent pas également ». Ce faisant, elle ouvre, nous semble-t-il, la possibilité d’introduire une clause de retrait statutaire.

L’associée retrayante estimait enfin que l’interdiction du retrait constitue une atteinte disproportionnée à son droit de propriété, contraire à l’article 6 § 1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales. Cet argument est également rejeté, de sorte qu’au final, la Cour infirme la sentence initiale du bâtonnier, déboute la demanderesse de sa demande de retrait capitalistique, ainsi que de sa demande d’expertise afin de valorisation de ses parts sociales.

Retrait d’exercice, retrait capitalistique et liberté d’exercice
 
Ni le bâtonnier ni la première cour d’appel saisie n’avaient semble-t-il fait la distinction entre les deux types de retrait existant, en exercice ou en capital.
 
Le retrait d’exercice consiste, on le comprend bien, à déplacer son cabinet d’une structure vers une autre, sans pour autant faire valoir un droit à céder ses parts. Dans ce cas, le retrayant exercera à l’extérieur de la structure, mais en reste associé non exerçant (ou « sleeping partner ») ce qui est admis, pendant une durée de dix années maximum par la loi du 31 décembre 1990.
 
Le retrait capitalistique quant à lui constitue un mode de révocation unilatérale du contrat de société, et entraîne des conséquences importantes sur les associés restants qui, outre la perte d’un associé et du « département » qu’il représente, devront financer le rachat des parts, eux-mêmes ou au travers d’une opération de réduction de capital.
 
Faute de clause de retrait capitalistique dans les statuts, il reste bien entendu pour l’associé la possibilité de se retirer en exercice seulement. C’est la solution logiquement retenue par ce second arrêt d’appel. Elle est exempte de critiques.
 
Attention toutefois, il nous semble qu’il existe des hypothèses dans lesquelles le retrait d’exercice peut lui-même être problématique, malgré l’abrogation de la règle d’unicité d’exercice par la Loi « Croissance » du 6 août 2015. Ce pourra être le cas, lorsque les statuts prévoient une clause statutaire d’exclusivité d’exercice, cette situation étant très fréquente. Dans ce cas, le problème paraît insoluble, car, dans la confrontation qui en résulte nécessairement, quelle est la valeur juridique la plus importante: l’engagement contractuel d’exclusivité ou le principe de la liberté d’exercice ? Au vu de la jurisprudence qui donne de plus en plus d’importance à la force obligatoire du contrat, en matière de société, le résultat de ce match n’est pas évident à prévoir.

Peut-on, suite à cet arrêt, stipuler valablement une clause de retrait dans les statuts ?
 
La Cour de cassation a affirmé clairement le contraire, par un obiter dictum, dans son arrêt du 12 décembre 2018. Rappelons en effet que dans l’espèce concernée, les statuts ne prévoyaient pas de clause de retrait. La cassation aurait donc pu n’être motivée que par l’absence de dispositions légales équivalentes à celles de l’article 1869 alinéa 1er du Code civil, qui autorise dans les sociétés civiles le retrait statutaire ou judiciaire.
 
Mais la Cour de cassation, qui n’y était pas tenue, a ajouté le membre de phrase : « peu important le contenu des statuts », expression de la volonté de la Haute Cour d’interdire toute stipulation statutaire ou contractuelle du retrait capitalistique. Comme l’indique un auteur, « cette double interdiction laisse perplexe compte tenu de la référence à la loi des parties qui justifie en même temps la cassation de l’arrêt. » (Serge Nonorgue « L’absence de droit de de droit au retrait de l’associé de SEL », la Semaine Juridique Entreprise et affaires n° 20, 16 mai 2019 page 22 et s.)
 
La cour d’appel de renvoi adopte, à ce sujet, une position prudente mais plus ouverte. Le refus du retrait capitalistique est en effet motivé par trois arguments successifs : (i) le contrat fait la loi des parties, en l’espèce, la loi des associés ; (ii) il n’existe aucune disposition légale ou réglementaire autorisant le retrait unilatéral ; (iii) enfin les statuts n’aménagent pas ce droit…. Sous-entendu : l’auraient-ils pu ? En d’autres termes, quelle serait la solution si une clause de retrait avait bel et bien été stipulée dans les statuts ?
 
La réponse reste sibylline à ce stade mais il semble bien que la cour d’appel de Caen ait voulu aller au-delà de l’arrêt du 12 décembre 2018, et qu’elle ait adopté plus franchement une vision contractuelle de la société.
 
On se souvient en effet de la querelle « société/contrat » ou « société/institution ». Dans la première hypothèse, les parties peuvent aménager librement leurs relations, et donc, pourront prévoir un droit de retrait. Dans la seconde, la société est soumise à un corpus de règles sur lesquelles les associés ne peuvent pas toujours contracter. Dans la vision institutionnelle, « les associés auraient leur propre intérêt commun, s'enrichir, mais comme ils ne formeraient qu'un sous-groupe d'une collectivité plus vaste, c'est l'intérêt de l'ensemble, l'intérêt de l'entreprise, qui devrait l'emporter » (Répertoire Dalloz,  Contrat de société – Éléments essentiels du contrat de société – Thibaut MASSART – Avril 2006, renouvellement de l’analyse institutionnelle)
 
L’arrêt du 12 décembre 2018 se rattache à la seconde école, alors qu’il est paradoxalement rendu au visa de l’article 1134 ancien du Code civil.
 
Mais la jurisprudence récente évolue nettement en faveur de la « société/contrat », évolution à laquelle la première chambre civile participe activement. On peut citer dans ce sens : « Les associés d’une société à responsabilité limitée peuvent déroger à une ou plusieurs clauses des statuts et s’en affranchir par l’établissement d’actes postérieurs, valables dès lors que tous les associés y consentent » (Cass. com., 12  mai 2015, n°  14-13744)
 
La décision la plus emblématique à ce titre est celle rendue récemment par la première chambre civile de la Cour de cassation dans un litige opposant une SELAS d’avocats à trois associés retrayants. Le règlement intérieur prévoyait la valorisation des actions au nominal, ce qui était contesté par lesdits retrayants, notamment sur le fondement de l’article 10 de la loi du 31 décembre 1990. (Cass. Civ. 1ère, 22 septembre 2021, n°20-15817, Obs. Ph. Touzet, Dalloz Actualités 12 oct. 2021)
 
La Cour d’appel de Paris (Paris, 12 février 2020, n° 2018/15568) avait rejeté les demandes des associés, sur le fondement de la force obligatoire du contrat : « si il n’est pas contesté que la valeur réelle des titres de la SELAS est beaucoup plus élevée que leur valeur nominale, force est de constater que les associés partants, juristes particulièrement expérimentés, ont accepté en pleine connaissance de cause la valorisation des parts à ce montant comme un des éléments déterminants de leur entrée dans la société… ». Le pourvoi des retrayants est sèchement rejeté : « considérant que la Cour d’appel a exactement énoncé que  rien n’interdisait à la SELAS d’adopter des dispositions statutaires prévoyant la détermination de la valeur des parts à leur valeur nominale et non réelle ».
 
Si la jurisprudence de la première chambre civile « 2022 » est opposable à la jurisprudence de la première chambre civile « 2018 », alors il devrait être possible désormais de stipuler un droit de retrait, qui sera opposable aux associés et à la société sur le fondement des dispositions du nouvel article 1103 du Code civil, particulièrement si ces associés sont des avocats qui sont des « juristes particulièrement expérimentés », dont le consentement est particulièrement éclairé et qui ne peuvent donc pas remettre en cause les dispositions qu’ils ont librement acceptées.
 
Droit de propriété et atteinte disproportionnée

L’atteinte disproportionnée au droit de propriété ne nécessite pas beaucoup de commentaires. La cour d’appel rejette l’argument en retenant que la retrayante conserve le droit de céder ses parts, qu’elle n’a pas été privée de son activité compte tenu de son retrait d’exercice, que ses droits patrimoniaux ne sont pas en péril, et enfin, qu’elle a été convoquée et a pu faire valoir sa position aux différentes assemblées générales de la société.

À l’évidence, l’associée devenue non exerçante à la suite de son retrait d’exercice conserve la propriété de ses parts sociales, peut exercer les droits en découlant, participer aux assemblées, aux distributions éventuelles de dividendes, initier toute action judiciaire, etc.

Un débat bientôt obsolète ?

Depuis début 2021, la direction générale des entreprises (DGE) travaille en concertation avec l’ensemble des professions libérales réglementées sur un projet de texte, qui constituera l’ordonnance pour laquelle le gouvernement vient d’être habilité, afin de réformer en profondeur la loi du 31 décembre 1990, devenue de l’avis de tous inintelligible. La loi n° 2022-172 du 14 février 2022 en faveur de l’activité professionnelle indépendante contient en effet, en son article 7, l’habilitation du gouvernement à légiférer par ordonnance, en vue de « clarifier, simplifier et mettre en cohérence les règles relatives aux professions libérales soumises à un statut législatif ou réglementaire ou dont le titre est protégé, d’une part, en précisant les règles communes qui leur sont applicables, et d’autre part, en adaptant les différents régimes juridiques leur permettant d’exercer sous forme de société. »

La plupart des professions libérales réglementées consultées – en ce compris le Conseil national des barreaux - ont demandé l’introduction d’un droit légal de retrait dans le nouveau texte. Ce texte n’est pas encore disponible, mais il devrait très vraisemblablement contenir une disposition à ce titre. Si tel est le cas, le contentieux relatif au principe même du droit de retrait, né en 2018, sera définitivement éteint.

Certes, le retrait redeviendra « la bombe à retardement » évoqué au début de cet article, mais l’auteur de ces lignes reste convaincu de la nécessité de l’institution. Le blocage d’un libéral avec des associés avec lesquels il est en mésentente est source de difficultés immenses, alors qu’au contraire, la structure dispose de la possibilité de financer la sortie du retrayant, d’autant plus facilement que l’associé qui part exercer à l’extérieur emmène généralement sa clientèle dont la valeur peut et doit être déduite de la valeur des parts sociales qui lui sont rachetées. L’opération n’est donc pas forcément ruineuse. Elle évite enfin une autre bombe à retardement, l’annulation, dix ans plus tard, des parts sociales lorsque la détention du capital par l’ancien associés perd sa légalité. Ne pas reculer, donc, pour mieux sauter !








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