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Publicité et démarchage : une nouvelle liberté pour les avocats ?


Rédigé par Philippe Touzet le Vendredi 10 Janvier 2014

On le savait déjà, puisque les textes européens sont directement applicables en France, mais le Conseil d'Etat vient de confirmer que la prohibition du démarchage pour les avocats est illicite.



C’est, sans tambour ni trompette, un bouleversement considérable pour la profession d’avocat.
 
Depuis l'arrêt de la Cour de Justice de l'Union Européenne en date du 5 avril 2011, qui avait été saisie par un groupe d'expertise comptable sur la base de la directive service (2006/123/ art 24), on savait que la prohibition du démarchage, règle classique qui s’imposait jusqu’alors à notre profession, sans que personne ne s’en émeuve, ne tiendrait plus longtemps.
 
L’un de nos confrères, dont le nom est masqué dans la décision, s’est alors adressé à la Chancellerie en vue de faire abroger les dispositions édictant ladite prohibition, et s’étant vu opposer un rejet, a saisi la juridiction administrative d’un recours pour excès de pouvoir.
 
Le Conseil d'État vient de rendre un arrêt.
 
C’est par un arrêt très bref, rendu en date du 13 décembre 2013, que le Conseil d'Etat fait droit à cette demande, estimant que les dispositions critiquées (figurant notamment dans la loi du 31 décembre 1971, le décret du 25 août 1972, et le décret « déontologie » du 12 juillet 2005) sont contraires aux dispositions de la directive. La décision du ministre ayant refusé de faire droit à la demande d'abrogation est donc annulée.
 
On rappellera que la directive « services » prévoit en effet que "les Etats membres suppriment toutes les interdictions totales visant les communications commerciales des professions réglementées… et que .. les Etats membres veillent à ce que les communications commerciales faites par les professions réglementées respectent les règles professionnelles… (qui doivent)… être non-discriminatoires, justifiées par une raison impérieuse d'intérêt général et proportionnées."
 
Qu'on estime ou non positive cette évolution, il n'en reste pas moins qu'un pan entier du statut spécifique des professions réglementées vient de tomber.
 
On pourrait discuter longuement des mérites des spécificités de la loi française en matière de professions civiles réglementées.
 
Pour notre part, nous n'appelons pas de nos vœux une assimilation totale aux entreprises commerciales. Chacune des professions réglementées :
 
  • a un rôle spécifique et les avocats ont en charge l'anticipation, la prévention, et le traitement de l'ensemble des conflits humains, individuels et collectifs ;
  • constitue une interface entre le public et l'administration qu'elle est en charge de mettre en œuvre. Il s’agit de l'autorité judiciaire, bien sur, pour les avocats.
 
Ces intérêts sont particulièrement stratégiques, pour chacun d'entre nous. Ils doivent être préservés, ce qui milite pour qu’ils ne soient pas abandonnés totalement à la libre concurrence vers laquelle nous entraine la dérégulation voulue par Bruxelles.
 
En tout cas, nous lecteurs verront sans doute très bientôt dans leur boite mail des mailings publicitaires et de démarchage, car il ne fait aucun doute que notre profession s'emparera rapidement de cette nouvelle liberté.








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