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Procédure de saisie d’un immeuble en indivision et débiteur en procédure collective


Rédigé par Julien Zavaro le Lundi 2 Septembre 2013

Les dispositions spéciales protégeant les créanciers de l’indivision priment-elles sur celles du droit des procédures collectives ? C’est à cette question que la Chambre civile de la Cour de cassation a répondu par l’affirmative dans un arrêt du 16 mai dernier.



Procédure de saisie d’un immeuble en indivision et débiteur en procédure collective
La question est importante en ce qu’elle se trouve au confluent de deux droits spécifiques, celui de l’indivision d’une part et celui des procédures collectives d’autre part.
 
Dans le cadre de l’indivision, le principe est que les créanciers d’un indivisaire ne peuvent saisir directement le bien indivis, sauf si leur droit est antérieur à la mise en indivision du bien. Dans ce cas,  le créancier peut passer outre et appliquer le droit commun de l’exécution.
 
Dans les autres cas, le créancier de l’indivisaire ne peut agir directement sur le bien, il devra par exemple agir obliquement pour forcer le partage pour être payé, en concurrence avec tous les autres créanciers.
 
Art. 815-17 du Code civil:
« Les créanciers qui auraient pu agir sur les biens indivis avant qu'il y eût indivision, et ceux dont la créance résulte de la conservation ou de la gestion des biens indivis, seront payés par prélèvement sur l'actif avant le partage. Ils peuvent en outre poursuivre la saisie et la vente des biens indivis.
Les créanciers personnels d'un indivisaire ne peuvent saisir sa part dans les biens indivis, meubles ou immeubles.
Ils ont toutefois la faculté de provoquer le partage au nom de leur débiteur ou d'intervenir dans le partage provoqué par lui. Les coïndivisaires peuvent arrêter le cours de l'action en partage en acquittant l'obligation au nom et en l'acquit du débiteur. Ceux qui exerceront cette faculté se rembourseront par prélèvement sur les biens indivis. »
 
De l’autre coté de l’équation, en cas de procédure collective, le jugement d’ouverture arrête et interdit toute procédure d’exécution ou de distribution portant sur les biens du débiteur failli selon l’article L622-21 du code de commerce.
 
L’article R622-19 du même code précise que, lorsqu’une procédure d’exécution a provoqué la vente d’un bien mais que le prix n’a pas encore distribué, le jugement d’ouverture interrompt la procédure de distribution et les fonds doivent être remis aux organes de la procédure.
 
Article R 622-19 du code de Commerce:
« Conformément au II de l'article L. 622-21, les procédures de distribution du prix de vente d'un immeuble et les procédures de distribution du prix de vente d'un meuble ne faisant pas suite à une procédure d'exécution ayant produit un effet attributif avant le jugement d'ouverture, en cours au jour de ce jugement, sont caduques. Les fonds sont remis au mandataire judiciaire, le cas échéant par le séquestre qui par cette remise est libéré à l'égard des parties. »
 
Dans l’espèce, une banque  poursuivait la saisie d'un immeuble, sur lequel elle bénéficiait d'un privilège de prêteur de deniers. Cet immeuble appartenait à l’indivision d’un couple d’ex-époux, dont l’un a été placé en liquidation judiciaire en cours de procédure. Le jugement d’ouverture de la procédure collective est intervenue après la vente du bien par adjudication judiciaire, mais avant que le prix en ait été distribué.
                                                                    
Les juges du fond estiment qu’au jour du jugement d’ouverture, les fonds n’étaient pas attribués, la procédure de distribution n’étant pas achevée.
Cette procédure de distribution étant caduque à compter du jugement d’ouverture de sa procédure collective,  ils estiment nécessaire de faire placer la part du prix correspondant aux parts de l’indivisaire failli sous séquestre, en application de l’article R622-19 du Code de commerce, pour permettre au mandataire « d'opérer la répartition de la quotepart revenant [à l’indivisaire failli] entre les différents créanciers selon leur ordre légal ».
 
C’est ce raisonnement que censure la deuxième chambre civile de la Cour de cassation, au visa de l’article 815-17 du Code civil et par un attendu laconique :
« la banque, créancière de l'indivision qui préexistait à l'ouverture de la procédure collective […] pouvait poursuivre la saisie et la vente de l'immeuble indivis pour être payée, avant le partage, par prélèvement sur l'actif, »
 
Payé avant le partage, le créancier « antérieur » de l’indivision n’a pas à subir la procédure de distribution, l’effet attributif avait donc pris date dés la consignation du prix par l’adjudicataire, et donc avant l’ouverture de la procédure collective.
 
Cet arrêt vient donc récompenser le créancier qui a fait l’effort d’agir vite, en lui évitant l’effet de la procédure collective.








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