La loi n°2011-331 du 28 mars 2011 de modernisation des professions juridiques et judiciaires a créé[[1]], pour les SCP, un mécanisme très novateur de dépatrimonialisation optionnelle. Ce texte, issu d’une proposition du sénateur Philippe Marini, parlementaire très attentif à notre profession, a notamment pour objet de favoriser le système de droit civil continental par le renforcement des cabinets français.
Faisant comme chacun le constat des difficultés posées par la patrimonialité des cabinets[[2]], le législateur permet désormais aux associés de SCP soit de fixer eux-mêmes la valeur des parts de la société, soit d'exclure toute valeur représentative de la clientèle civile de la valeur des parts sociales : « Les statuts peuvent, à l'unanimité des associés, fixer les principes et les modalités applicables à la détermination de la valeur des parts sociales. Sauf dispositions contraires du décret particulier à chaque profession, la valeur des parts sociales prend en considération une valeur représentative de la clientèle civile. Toutefois, à l'unanimité des associés, les statuts peuvent exclure cette valeur représentative de la clientèle civile de la valorisation des parts sociales. »
Ce texte ne contenant aucune restriction, une telle clause aura vocation à s’appliquer à toutes les situations, y compris cession de gré à gré ou retrait d'un associé. C’est donc un moyen simple, on le comprend bien, de faire de la SCP un véhicule de transmission (presque[[3]]) aussi simple que les structures non patrimoniales.
Ainsi, alors que dans une société de droit commun, il ne serait pas possible de vendre des titres pour la seule valeur des capitaux propres, sans se voir sévèrement rappelé à l’ordre par le fisc, les avocats en SCP peuvent décider du contraire et tenir la valeur de la clientèle pour nulle, ou la déterminer entre eux, sans remise en cause par le fisc possible[[4]].
Qu’en est-il pour les SEL ? Un dispositif semblable a été introduit en 2012 par la loi Warsmann[[5]], modifiant l’article 10[[6]] de la loi du 31 décembre 1990, mais la rédaction défaillante de cet article conduit à douter de sa portée. Il semble en effet être limité au cas de refus d’agrément, et pourrait n’être pas applicable en cas de retrait, d’exclusion, ou de cession de gré à gré. Autant dire que l’interprétation restrictive du texte, si elle devait devenir celle de la jurisprudence, reviendrait à supprimer tout intérêt à la réforme, tant les cas de refus d’agrément sont peu nombreux.
Les travaux parlementaires sont pourtant clairs quant à l’intention du législateur : « Cet article … a pour objet de transposer aux sociétés d’exercice libéral (SEL) le dispositif de valorisation statutaire des droits sociaux dans les [SCP] introduit… par la loi n° 2011-331 du 28 mars 2011 de modernisation des professions judiciaires et juridiques réglementées[[7]] ... ».
Le même rapport fait d’ailleurs un très lucide constat sur les inconvénients de la patrimonialité : « Cette situation est un facteur de fragilisation des structures d’exercice des professions réglementées. Elle conduit à reconnaître une valeur vénale à la clientèle civile. Cette patrimonialisation constitue un obstacle à l’intégration des jeunes professionnels… »
L'interprétation de l'article 10 n'est donc pas une tâche aisée. En se référant aux travaux parlementaires, on pourra plaider l’interprétation extensive, mais il faut rester prudent tant qu’aucun juge ne s’est prononcé, ce qui n’est pas encore intervenu au jour où nous rédigeons cet article.
Faisant comme chacun le constat des difficultés posées par la patrimonialité des cabinets[[2]], le législateur permet désormais aux associés de SCP soit de fixer eux-mêmes la valeur des parts de la société, soit d'exclure toute valeur représentative de la clientèle civile de la valeur des parts sociales : « Les statuts peuvent, à l'unanimité des associés, fixer les principes et les modalités applicables à la détermination de la valeur des parts sociales. Sauf dispositions contraires du décret particulier à chaque profession, la valeur des parts sociales prend en considération une valeur représentative de la clientèle civile. Toutefois, à l'unanimité des associés, les statuts peuvent exclure cette valeur représentative de la clientèle civile de la valorisation des parts sociales. »
Ce texte ne contenant aucune restriction, une telle clause aura vocation à s’appliquer à toutes les situations, y compris cession de gré à gré ou retrait d'un associé. C’est donc un moyen simple, on le comprend bien, de faire de la SCP un véhicule de transmission (presque[[3]]) aussi simple que les structures non patrimoniales.
Ainsi, alors que dans une société de droit commun, il ne serait pas possible de vendre des titres pour la seule valeur des capitaux propres, sans se voir sévèrement rappelé à l’ordre par le fisc, les avocats en SCP peuvent décider du contraire et tenir la valeur de la clientèle pour nulle, ou la déterminer entre eux, sans remise en cause par le fisc possible[[4]].
Qu’en est-il pour les SEL ? Un dispositif semblable a été introduit en 2012 par la loi Warsmann[[5]], modifiant l’article 10[[6]] de la loi du 31 décembre 1990, mais la rédaction défaillante de cet article conduit à douter de sa portée. Il semble en effet être limité au cas de refus d’agrément, et pourrait n’être pas applicable en cas de retrait, d’exclusion, ou de cession de gré à gré. Autant dire que l’interprétation restrictive du texte, si elle devait devenir celle de la jurisprudence, reviendrait à supprimer tout intérêt à la réforme, tant les cas de refus d’agrément sont peu nombreux.
Les travaux parlementaires sont pourtant clairs quant à l’intention du législateur : « Cet article … a pour objet de transposer aux sociétés d’exercice libéral (SEL) le dispositif de valorisation statutaire des droits sociaux dans les [SCP] introduit… par la loi n° 2011-331 du 28 mars 2011 de modernisation des professions judiciaires et juridiques réglementées[[7]] ... ».
Le même rapport fait d’ailleurs un très lucide constat sur les inconvénients de la patrimonialité : « Cette situation est un facteur de fragilisation des structures d’exercice des professions réglementées. Elle conduit à reconnaître une valeur vénale à la clientèle civile. Cette patrimonialisation constitue un obstacle à l’intégration des jeunes professionnels… »
L'interprétation de l'article 10 n'est donc pas une tâche aisée. En se référant aux travaux parlementaires, on pourra plaider l’interprétation extensive, mais il faut rester prudent tant qu’aucun juge ne s’est prononcé, ce qui n’est pas encore intervenu au jour où nous rédigeons cet article.
[[1]] Par ajout de deux alinéas à l'article 10 de la loi 66-879 du 29 novembre 1966 relative aux SCP
[[2]] Cf. infra § n°2
[[3]] Il faudra tout de même signer un acte de cession, réaliser les formalités et payer les droits résiduels
[[4]] Sous réserve d’un abus de droit ou d'un acte anormal de gestion
[[5]] Art. 29 II de la loi 2012-387 du 22 mars 2012
[[6]] Attention à la confusion, c’est bien l’article 10 de la loi de 1966 (SCP) et l’article 10 de la loi de 1990 (SEL)
[[7]] Rapport Etienne Blanc n° 3787 du 05/10/2011