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Rémunération des dirigeants de sociétés cotées : une pierre dans le jardin du conseil d’administration ?


Rédigé par Philippe Touzet le Mercredi 21 Août 2013

La recommandation n° 24.3 du code de gouvernement d'entreprises AFEP / MEDEF tel que modifié en juin 2013, préconise de soumettre la rémunération des dirigeants de sociétés cotées à un avis consultatif de l'assemblée générale.



Rémunération des dirigeants de sociétés cotées : une pierre dans le jardin du conseil d’administration ?
A coté des nombreuses dispositions qui, depuis la loi sur les Nouvelles Régulations Economiques du 15 mai 2001, obligent les sociétés à communiquer sur la rémunération octroyée à leurs dirigeants, quelle que soit la forme de la rémunération, l'association française des entreprises privées (AFEP) et le mouvement des entrepreneurs de France (MEDEF) ont, sous la pression des pouvoirs publics, fait un pas supplémentaire en instaurant un droit de regard de l'assemblée sur le montant des rémunérations des dirigeants.
 
Jusqu'ici domaine réservé du conseil d'administration, la fixation des rémunérations des dirigeants de sociétés cotées sera soumise pour avis à l'assemblée.  
 
Cette dernière aura un droit de regard, mais pas un droit de veto, puisque l'avis de l'assemblée sera seulement consultatif.
 
Le code AFEP / MEDEF n'a par ailleurs pas de caractère obligatoire, les sociétés étant incitées à appliquer, selon leurs possibilités et leurs situations, les recommandations contenues.
 
Mais ces recommandations, et c'est leur objectif, agissent comme un moyen de pression vis-à-vis de l'opinion, des actionnaires et surtout des investisseurs.  
 
Le code de commerce quant à lui (art L 225-37 al 7) impose aux sociétés cotées, lorsqu'elles écartent certaines recommandations des codes élaborés par des organisations représentatives d'expliquer les raisons de leur choix, selon le principe, "appliquer ou expliquer".    
 
Il n'est pas obligatoire pour une société de se référer à un code de gouvernance, mais dans ce cas l'article L 225-37 al 7 lui impose de détailler les mesures équivalentes qu'elle a adoptées et de justifier sa décision d'écarter un tel code. La pression est donc relativement forte.   
 
Le gouvernement a donc choisi de ne pas légiférer sur la question du "say on pay" et de s'en remettre à l'autodiscipline des sociétés.
 
En pratique on note, en observant la situation des pays dans lesquelles le "say on pay" est appliqué, que l'assemblée n'émet pratiquement jamais d'avis négatif sur les rémunérations qui lui sont soumises (AMF rapport annuel 2012 sur le gouvernement d'entreprises, page 29). Cela ne signifie pas que cette procédure n'a aucun intérêt car on peut raisonnablement considérer qu'il existe une autocensure du conseil d'administration, qui garde la main sur la fixation du montant des rémunérations, lorsqu'il sait que l'assemblée aura un droit de regard. Ainsi, aux Etats-Unis, le secteur bancaire semble s'être légèrement auto discipliné pour les rémunérations 2012, qui restent bien entendu stratosphériques, avant le passage en assemblée.      
 
En outre, la recommandation 24.3 précise : "lorsque l'assemblée générale ordinaire émet un avis négatif, le conseil, sur avis du comité des rémunérations, délibère sur ce sujet lors d'une prochaine séance et publie immédiatement sur le site Internet de la société un communiqué mentionnant les suites qu'il entend donner aux attentes exprimées par les actionnaires lors de l'assemblée générale".
 
Il y a donc dans cette hypothèse une pierre, de taille assez importante, dans le jardin du conseil.
                                                                                     
Certains auteurs estiment que cette évolution du code AFEP/MEDEF constitue un prélude à une position plus contraignante qui verra le pouvoir de décision transmis à l'assemblée (Alain Viandier La Semaine Juridique Entreprise et Affaires n° 29 18 juillet 2013,1416).
 
Il est en effet possible d'imaginer transférer à l'assemblée le pouvoir de fixer, par exemple, un plafond global de rémunération des dirigeants, annuel ou pluriannuel, à l'image de ce qui est prévu pour les jetons de présence.
 
Pour les entreprises publiques, la rémunération maximale des dirigeants mandataires a ainsi été fixée à 450.000 € annuels, censés représenter un écart de un à vingt par rapport au salaire minimum (Art 1 du Décret 2012-915 du 26 juillet 2012 modifiant l'article 3 du décret n°53-707 du 9 août 1953 relatif au contrôle de l'Etat sur les entreprises publiques nationales et certains organismes ayant un objet d'ordre économique ou social).

 








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