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Réécriture du Code de la consommation : le droit est constant mais les définitions changent !


Rédigé par Julien Zavaro le Jeudi 7 Avril 2016

Le gouvernement a entièrement réécrit la partie législative du Code de la consommation par ordonnance du 14 mars 2016, applicable au 1er juillet 2016. Cette réécriture, n’est pas une simple renumérotation, et va avoir d’importantes conséquences pratiques.



L’ordonnance n°2016-301 du 14 mars 2016 vient réécrire intégralement la partie législative du Code de la consommation, la nouvelle rédaction étant applicable au 1er juillet 2016.
 
Selon le Gouvernement, cette codification serait faite « à droit constant », c’est-à-dire sans modification sur le fond, sauf en matière de pouvoirs d’enquête des agents de contrôle :
 
« Si l’essentiel de cette refonte intervient à droit constant, sous la réserve de modifications rendues nécessaires pour assurer le respect de la hiérarchie des normes et la cohérence rédactionnelles des textes ainsi rassemblées, harmoniser l’état du droit, remédier aux éventuelles erreurs ou insuffisances de codification et abroger les dispositions, codifiées ou non, devenues sans objet, l’habilitation a toutefois permis au codificateur d’appeler au-delà du droit constant en matière de pouvoir d’enquête des agents de contrôle »  (extrait du rapport au Président de la République).
 
Il convient cependant de constater que les nouvelles définitions ajoutées à l’article préliminaire du code de la consommation ne correspondent pas à l’état de la jurisprudence, et vont avoir des conséquences importantes sur les contentieux futurs.
 
L’article préliminaire du Code de la consommation disposera, à compter du 1er juillet 2016 :
 
« Pour l'application du présent code, on entend par :
 
- consommateur : toute personne physique qui agit à des fins qui n'entrent pas dans le cadre de son activité commerciale, industrielle, artisanale, libérale ou agricole ;
 
- non-professionnel : toute personne morale qui agit à des fins qui n'entrent pas dans le cadre de son activité commerciale, industrielle, artisanale, libérale ou agricole ;
 
- professionnel : toute personne physique ou morale, publique ou privée, qui agit à des fins entrant dans le cadre de son activité commerciale, industrielle, artisanale, libérale ou agricole, y compris lorsqu'elle agit au nom ou pour le compte d'un autre professionnel. »
 
Pourtant la jurisprudence applique le statut de « non professionnel » a tout professionnel qui contracte en dehors de son champ « principal » d’activité.
 
Ainsi, la Cour de cassation a récemment considéré qu’une société de promotion immobilière pouvait bénéficier de l’article L.132-1 du Code de la consommation en tant que « non professionnel » dans un litige l’opposant à un contrôleur technique :
 
« Mais attendu, d'une part, qu'ayant relevé que la SCI, promoteur immobilier, était un professionnel de l'immobilier mais pas un professionnel de la construction, la cour d'appel a pu retenir que celle-ci devait être considérée comme un non-professionnel vis-à-vis du contrôleur technique en application de l'article L.132-1 du code de la consommation ; » (Cass. Civ 3ème, 4 février 2016, n° 14-29347, publié au bulletin)
 
Selon la nouvelle définition, le promoteur qui contracte avec un contrôleur technique est clairement « dans le cadre » de son activité de promotion immobilière, qu’elle exerçait à titre commercial (construction pour revendre)
 
Elle n’est donc pas un « non professionnel » selon la nouvelle définition !
 
On se souvient qu’avant que la Loi « consommation » du 17 mars 2014, dite loi « HAMON », ne définisse le consommateur comme une personne physique, les juridictions reconnaissaient cette qualité à des personnes morales, en particulier à certaines associations.
 
Nous voilà à nouveau dans la même situation : la définition adoptée par le gouvernement rend inapplicables les solutions antérieures.
 
L’avenir nous dira comment ces nouvelles définitions seront interprétées par les juridictions.
 
Dans l’intervalle, la plus grande prudence est de mise.
 
L’ordonnance prendra effet au premier juillet 2016. En l’absence de disposition transitoires, et si on considère que la première définition légale d’une notion juridique est « seulement » interprétative, les nouvelles définitions pourraient s’appliquer dès cette date, y compris aux litiges en cours.

Ordonnance n°2016-301 du 14 mars 2016 
Rapport au Président de la République

 








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